mercredi 12 novembre 2008

In the criminal justice system...

Pour qui suit l’actualité américaine, il est toujours intéressant de voir à quel point la franchise Law & Order peut être réactive sur son traitement des faits divers. Lors de la diffusion française qui arrive toujours un à deux ans après la diffusion américaine, ces faits divers qui n’ont pas forcément tous faits les gros titres chez nous ne sont plus qu’un lointain souvenir et les épisodes traitant de ces sujets ne sont alors pas bien différents des autres. Mais les scénaristes américains font souvent écho de l’actualité dans les séries et en particulier dans Law & Order, SVU et CI. Dans les autres séries, cela se matérialise généralement sous la forme d'une référence au cours d’un dialogue que l’on s’assurera bien de supprimer lors du doublage français.
Mais dans le cas des séries Law & Order, l’épisode entier se basant sur le fait divers en question, il est intéressant de voir le traitement qu’il en est fait. Évidemment cette vision de l’évènement est toute subjective car il s’agit ici de fiction qui, même inspirée du réel, ne décrit pas les faits et gestes des protagonistes de manière réelle, et qui parfois donne même une résolution de l’affaire qui n’a pas forcément été résolue dans la réalité mais le fait divers de base permet, comme toujours dans les séries Law & Order, de soulever un début de questionnement sur la société dans laquelle nous vivons (même s’il s’agit évidemment de la société américaine, certaines questions trouvent un résonnement ici, et certaines questions sont d’ailleurs simplement liées à la nature humaine).
Ce que je trouve impressionnant c’est la rapidité du traitement. Dernier exemple en date, l’épisode 6 de la saison 10 de SVU qui vient d’être diffusé aux États-Unis reprend à peine quatre mois après les faits, le fait divers sur le pacte de grossesses simultanées conclu par des lycéennes. L’affaire est immédiatement identifiée et permet de trouver une accroche rapide et de se concentrer sur les questions juridiques et sociétales posées. Je trouve dommage que les séries françaises (qui sont d’ailleurs d’une qualité médiocre m’enfin passons) n’utilisent pas ce genre d’accroche qui permet de garder le téléspectateur (qui voudra voir ce qu’il connait, c’est le principe des rediffusions) tout en l’amenant à autre chose. Faire une adaptation de Law & Order CI en Paris, enquêtes criminelles, pourquoi pas, mais si c’est pour refaire exactement le même épisode qu’on a déjà vu sur la même chaine, simplement on change le décor et les acteurs, ça n’est pas la peine. Pourquoi ne pas avoir adapté la série au lieu d’en faire une (mauvaise) copie conforme ? Quoi, nous n’avons pas de faits divers ni de questions de société en France ? Je connaît évidemment la réponse à ma question, TFbeurk étant probablement trop frileuse pour faire réfléchir la ménagère et offenser ses amis haut placés pour dénoncer par exemple un scandale quelconque (je fais référence à l’épisode 18x18 de Law & Order sur le scandale du gouverneur Spitzer). Dick Wolf a peut-être aussi refusé de laisser les Français prendre trop de libertés avec sa franchise (et au vu de ce qu’est la production française, il a sûrement eu raison).
Mais voilà, malgré tout, je garde espoir. Quand je vois Engrenages, je me dis qu’il y a de l’espoir pour la fiction française. Mais un espoir tellement mince. Et c’est bien dommage car je ne veux pas croire que la France est dépourvue de scénaristes de qualité. Certes, il est plus difficile de venir à un Law & Order qu’à un CSI où il suffit de s’asseoir tranquillement, et d’attendre qu’on nous donne un peu de frissons, un peu d’enquête policière avec nos experts (qui sont un peu des Heroes aussi vu qu’ils arrivent à repérer du premier coup à l’œil nu une minuscule fibre de 0,5mm dans une moquette) et surtout, une fois qu’on a éteint la télé, c’est terminé, comme diraient les guignols « vous pouvez reprendre une activité normale ».
Bon, je voulais parler de Law & Order, j’ai parlé de l’état de la fiction française. Asystolie, vous avez dit ? Vite, amenez-moi le charriot de réa !

2 commentaires:

Anonyme a dit…

Nous avons de bons scénaristes en France. Il n'y a aucune raison pour qu'ils naissent tous de l'autre côté de l'Atlantique, ou qu'ils soient tous détournés de leur vocation, ou qu'ils partent tous sous d'autres cieux. Le soucis c'est qu'on traite les scénaristes comme des employés et non comme des auteurs (problème récurrent pour toutes les professions normalement artistiques à la télé... ne me laisse pas m'épancher sur les acteurs français !). Ils sont là pour prendre les commandes des chaînes, des sociétés de productions, et c'est tout ; et ceux qui bossent sur le long terme sont ceux qui ont le talent de s'exprimer le moins possible créativement. A quelques merveilles exceptions près, ça va de soi.
Après, y a-t-il des questions de société en France, évidemment oui, la télé est-elle prête pour en parler en fiction, malheureusement non. Encore une fois, c'est une question d'éducation télévisuelle, je le dis et le répète depusi des lustres. Aux Etats-Unis ça fait plusieurs décennies que les films et/ou les séries font ce travail sur la société, mais aussi sur l'Histoire, et d'ailleurs la capacité à revenir sur l'Histoire (dont on pourrait penser qu'elle est digérée) est un bon indicateur de la capacité à aborder les problèmes de société récents, je pense. Combien de L'Enfer du Devoir, Band of Brothers ou Generation Kill là-bas ? Et nous ? On n'arrive même pas à parler de ce qui est censé ne plus être un sujet sensible. Alors des sujets de société brûlants... de quoi ? Quatre mois ? On n'est carrément pas prêts.
Mais tu as raison, c'est de la frilosité. Sauf que du coup, on n'éduque pas le spectateur. Et du coup, on a peur de le choquer la fois suivante où quelqu'un propose pareil projet. C'est le serpent qui se mord la queue.

Anonyme a dit…

Ce qui est quand même bizarre, ce que ça n'a pas touhours été le cas.
De 1980 à 1989 la série "Julien Fontanes, Magistrat" faisait régulièrement scandale, car s'attaquant de front à des problèmes de société tels que l'alcoolisme, la fugue, le terrorisme, le crime passionnel, la réinsertion, l'erreur judiciaire, la violence domestique etc., au travers de scenarii intelligents et passionnants.
Dans "La Dictée", feuilleton en 6 épisodes de 45 minutes, nous assistions à la séparation de l'église et de l'Etat à travers le quotidien d'une école de campagne.
Nous n'avons certes pas de TOUR OF DUTY de la guerre d'Algérie, mais dire que la fiction française ne sait pas regarder en arrière, ni analyser son histoire serait faux.
La mini-série "Les enfants du printemps" (2000) revient de manière remarquable sur les années Mitterrand et le téléfilm "La dette" (2000), revient sans concession sur l'attitude de la France vis-à-vis des tirailleurs sénégalais.
Donc oui, nous avons de bons scénaristes, mais ceux-ci sont malheureusement bridés par des responsables de chaînes peu scrupuleux, qui préfèrent se contenter de programmes bas de gamme ("Plus belle la vie" et autres "Joséphine") voire de (mal) copier des fictions étrangères.
A ce titre, il est plus que dommage que le câble français n'ait pas les moyens de son homologue américain.
Car ce n'est pas Canal +, malgré quelques trop rares réussites ("Engrenages", "Scalp") qui va redonner au genre ses lettres de noblesse.
Mais bon, à défaut de fiction française de qualité, nous avons de la fiction francophone de qualité... outre-Atlantique avec ce joyau qu'est "Minuit, le soir"...